Le pont des huit lis

De Histoire de Chine

Cet article est une contribution du Souvenir Français de Chine. → Visitez le site du Souvenir Français

rédigé par Jean-Louis Petit

Le 21 septembre, 11h30 ...

La signature des traités mettant fin à la guerre de l’opium et ouvrant la Chine au commerce occidental et au christianisme est perçue par la population chinoise au mieux comme l’expression de la mansuétude impériale vis-à-vis de ces  « barbares crus », au pire comme une humiliation supplémentaire.

Escarmouches, incidents et massacres vont donc se multiplier et conduire à l’organisation de deux expéditions franco-anglaises visant à rétablir l’ordre des traités.

Lors de la deuxième expédition, le 21 septembre 1860, à quatre kilomètres (ou huit lis) à l’est de Pékin, dans cette grande plaine qui s’étend jusqu’au port de Tianjin, le corps expéditionnaire franco-britannique se met en marche « dès l’aube par un temps clair, gai et frais, avec quelques brouillards légers flottant ici ou là »

La bataille va très rapidement s’engager contre la cavalerie mandchoue, massée près du pont des huit lis (Ba Li Qiao) qui barre le canal et la route de Pékin. Cette cavalerie est renforcée par une artillerie importante.

Ce qui va surprendre les soldats français dès les premiers accrochages, c’est l’absence totale de commandements donnés dans l’armée adverse, tout s’effectuant en silence par des mouvements de bannières.

Le sort restera longtemps incertain. C’est l’artillerie française qui parvient finalement  à désorganiser l’ennemi et c’est la charge ordonnée par le général  Cousin-Montauban, commandant les troupes françaises, qui permet d’emporter l’affaire dans l’après-midi .

« Les environs du pont des huit lis étaient jonchés de cadavres » et la grande bannière impériale du Connétable était finalement tombée entre les mains des envahisseurs.

L’affaire se termine, on le sait, par le sac du palais d’été le 7 octobre.

Initié avant tout par les Chinois du voisinage, puis organisé par les Anglais de façon méthodique, ce pillage a été pour les Français l’occasion d’assouvir leur passion pour les horloges mécaniques, innombrables au palais, sans valeur et pour la plupart fabriquées en Europe. Au campement du soir, « chaque troupier avait ainsi son coucou, son singe ou son lapin, chacun sonnant à son heure ».

Pour ce fait d’armes devant Pékin, le général Cousin-Montauban sera fait comte de Palikao (= Ba Li Qiao) par Napoléon III en 1862, titre héréditaire, mais le sac du palais lui coûtera le maréchalat auquel ses titres de guerre lui auraient donné droit.

Epilogue : Peut-être parce que le même général Cousin-Montauban s’était illustré dans sa jeunesse lors de la prise de la smalah d’Abd El Kader en Algérie, un village fut créé le 28 janvier 1870 en Oranie portant le nom de Palikao et nommé ainsi en souvenir d’une victoire militaire française en Chine.

Ce fameux pont des huit lis existe encore aujourd’hui. Il est perdu dans une banlieue pékinoise bien triste et il n’enjambe plus qu’un filet d’eau sale. Pour ceux qui le chercheraient encore, il est situé à quelques mètres d’une station de métro nommée…  Ba Li Qiao.